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Affaire Neyret: «Ma sanction, je l'ai déjà eue, je ne suis plus policier»
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Affaire Neyret: «Ma sanction, je l'ai déjà eue, je ne suis plus policier»
Ce lundi, Gilles Guillotin comparaît devant la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Avec lui, huit autres prévenus seront jugés, dont l’emblématique Michel Neyret, ex-star de la PJ lyonnaise, son ancien chef. L’ex-numéro 2 de la Police judiciaire de Grenoble, à la retraite anticipée, est renvoyé devant le tribunal pour trafic de stupéfiant et association de malfaiteurs. La justice lui reproche d'avoir prélevé de la drogue saisie afin de rémunérer un indic en nature sur les ordres de Michel Neyret. Gilles Guillotin vient de publier un livre, 33 ans flic pour rien ? (Ed. Temporis) dans lequel il raconte un métier qu’il a quitté à regret et où il règle ses comptes avec une institution sur laquelle il ne se fait plus aucune illusion.
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Pour plein de raisons, mais surtout parce qu’après l’affaire Neyret, j’ai entendu plein de choses, des donneurs de leçons. On a qualifié les méthodes de Neyret d’archaïques. Je ne me reconnaissais pas dans tout ça. J’ai donc décidé de faire un travail de mémoire pour voir ce qu’il en était exactement.
Vous êtes à la retraite aujourd’hui, qu’est-ce qui vous manque le plus dans votre métier ?
Le sentiment d’utilité, surtout. Et puis il y a l’adrénaline qui n’est plus là. Avant, quand je me levais le matin, je me disais que j’allais intervenir sur un go fast, alors que là c’est l’encéphalogramme plat. Depuis cinq ans, je suis également privé de mes amis. Quand vous faites ce métier, tous vos amis sont policiers, parce qu’il y a des choses que vous ne pouvez raconter qu’à des collègues. Mon contrôle judiciaire m’empêche d’avoir le moindre rapport avec eux. J’ai rendu mon insigne et mon arme sur le coin d’un bar, parce que je n’avais pas le droit de retourner dans mon bureau. Après 33 ans, ça cause pas mal de secousses dans la tête.
Dans votre livre, vous semblez regretter une époque où la police scientifique était moins présente ?
Oui, avant c’était l’humain qui se trouvait au cœur de tout. Il y avait peu d’écoutes téléphoniques puisqu’il n’y avait pas de portable. Tout se faisait à l’ancienne, avec des renseignements humains, à la tchatche, à la connaissance du dossier. On y reviendra forcément : quand on voit l’enquête sur les attentats de Paris et de Bruxelles, on se rend compte que ce sont des renseignements humains qui ont permis de loger Abaaoud, ou bien un taxi qui a permis de trouver l’appartement des kamikazes à Schaerbeek.
Vous êtes également très critique sur l’institution ?
En 2004, le gouvernement a permis un système de rémunération des indic' qui ne correspond pas à la réalité du terrain niveau timing et montant. Après l’affaire Neyret, on a essayé de laver plus blanc que blanc. Aujourd’hui, le moindre geste dans la police est couvert par la justice. L’incinération des produits stupéfiants se fait en présence d’un magistrat par exemple. L’omniprésence des médias entre autres, n’est sûrement pas étrangère à tout cela. Les fuites dans la presse sont organisées et viennent forcément de l’institution. Dans mon dossier, j’ai tout appris d’abord par les journalistes : ma mise en examen, puis ma réintégration. Le système policier a prouvé ses limites avec cette affaire.
Quelles limites ?
Me David Metaxas, qui est jugé en même temps que moi, n’a pas été suspendu par son Conseil de l’ordre. Moi j’ai tout de suite été suspendu, alors qu’aucune perquisition n’a été menée chez moi et dans mon bureau, aucune mise sur écoute n’a été ordonnée. On a amputé un quart de mon salaire. Et cinq mois plus tard, l’IGPN (Inspection générale de la police nationale) est venue me voir pour me dire que j’étais réintégré alors que j’étais toujours mis en examen pour trafic de drogue et association de malfaiteurs. On m’a rendu mon badge et mon arme alors que rien n’avait changé. Ça n’a aucun sens.
Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous aujourd’hui ?
Je suis impatient que le procès commence, pour écouter, comprendre si j’ai été floué ou pas, m’expliquer et j’espère regagner ma liberté d’aller et venir. J’ai eu des passages à vide au cours des dernières années, je me suis jeté dans le sport pour ne pas craquer. Aujourd’hui j’attends avec impatience que ça commence. Et j’espère que tout s’arrêtera avec ce procès. Mais ma sanction, je l’ai déjà eue, je ne suis plus policier et on m’a jeté en pâture aux médias.
Que pensez-vous de Michel Neyret aujourd’hui ?
C’est un flic extraordinaire, un grand monsieur de la police qui connaissait tous les dossiers de tous les groupes de son service sur le bout des doigts. Ça n’a jamais été un ami, c’était mon directeur, avec qui j’entretenais des rapports de respect je crois. Pour le reste, je ne sais pas. J’émets un bémol technique pour le moment, puisque je suis dans la merde à cause de lui depuis cinq ans. J’attends le procès pour voir si ce qui lui est reproché est vrai. On dit que pour qu’une infraction soit constatée, il faut que trois éléments soient réunis : légal, moral et matériel. J’apporte une grande importance à l’élément moral.
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Pour plein de raisons, mais surtout parce qu’après l’affaire Neyret, j’ai entendu plein de choses, des donneurs de leçons. On a qualifié les méthodes de Neyret d’archaïques. Je ne me reconnaissais pas dans tout ça. J’ai donc décidé de faire un travail de mémoire pour voir ce qu’il en était exactement.
Vous êtes à la retraite aujourd’hui, qu’est-ce qui vous manque le plus dans votre métier ?
Le sentiment d’utilité, surtout. Et puis il y a l’adrénaline qui n’est plus là. Avant, quand je me levais le matin, je me disais que j’allais intervenir sur un go fast, alors que là c’est l’encéphalogramme plat. Depuis cinq ans, je suis également privé de mes amis. Quand vous faites ce métier, tous vos amis sont policiers, parce qu’il y a des choses que vous ne pouvez raconter qu’à des collègues. Mon contrôle judiciaire m’empêche d’avoir le moindre rapport avec eux. J’ai rendu mon insigne et mon arme sur le coin d’un bar, parce que je n’avais pas le droit de retourner dans mon bureau. Après 33 ans, ça cause pas mal de secousses dans la tête.
Dans votre livre, vous semblez regretter une époque où la police scientifique était moins présente ?
Oui, avant c’était l’humain qui se trouvait au cœur de tout. Il y avait peu d’écoutes téléphoniques puisqu’il n’y avait pas de portable. Tout se faisait à l’ancienne, avec des renseignements humains, à la tchatche, à la connaissance du dossier. On y reviendra forcément : quand on voit l’enquête sur les attentats de Paris et de Bruxelles, on se rend compte que ce sont des renseignements humains qui ont permis de loger Abaaoud, ou bien un taxi qui a permis de trouver l’appartement des kamikazes à Schaerbeek.
Vous êtes également très critique sur l’institution ?
En 2004, le gouvernement a permis un système de rémunération des indic' qui ne correspond pas à la réalité du terrain niveau timing et montant. Après l’affaire Neyret, on a essayé de laver plus blanc que blanc. Aujourd’hui, le moindre geste dans la police est couvert par la justice. L’incinération des produits stupéfiants se fait en présence d’un magistrat par exemple. L’omniprésence des médias entre autres, n’est sûrement pas étrangère à tout cela. Les fuites dans la presse sont organisées et viennent forcément de l’institution. Dans mon dossier, j’ai tout appris d’abord par les journalistes : ma mise en examen, puis ma réintégration. Le système policier a prouvé ses limites avec cette affaire.
Quelles limites ?
Me David Metaxas, qui est jugé en même temps que moi, n’a pas été suspendu par son Conseil de l’ordre. Moi j’ai tout de suite été suspendu, alors qu’aucune perquisition n’a été menée chez moi et dans mon bureau, aucune mise sur écoute n’a été ordonnée. On a amputé un quart de mon salaire. Et cinq mois plus tard, l’IGPN (Inspection générale de la police nationale) est venue me voir pour me dire que j’étais réintégré alors que j’étais toujours mis en examen pour trafic de drogue et association de malfaiteurs. On m’a rendu mon badge et mon arme alors que rien n’avait changé. Ça n’a aucun sens.
Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous aujourd’hui ?
Je suis impatient que le procès commence, pour écouter, comprendre si j’ai été floué ou pas, m’expliquer et j’espère regagner ma liberté d’aller et venir. J’ai eu des passages à vide au cours des dernières années, je me suis jeté dans le sport pour ne pas craquer. Aujourd’hui j’attends avec impatience que ça commence. Et j’espère que tout s’arrêtera avec ce procès. Mais ma sanction, je l’ai déjà eue, je ne suis plus policier et on m’a jeté en pâture aux médias.
Que pensez-vous de Michel Neyret aujourd’hui ?
C’est un flic extraordinaire, un grand monsieur de la police qui connaissait tous les dossiers de tous les groupes de son service sur le bout des doigts. Ça n’a jamais été un ami, c’était mon directeur, avec qui j’entretenais des rapports de respect je crois. Pour le reste, je ne sais pas. J’émets un bémol technique pour le moment, puisque je suis dans la merde à cause de lui depuis cinq ans. J’attends le procès pour voir si ce qui lui est reproché est vrai. On dit que pour qu’une infraction soit constatée, il faut que trois éléments soient réunis : légal, moral et matériel. J’apporte une grande importance à l’élément moral.
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