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Le PCC, la très secrète confrérie brésilienne du crime
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Le PCC, la très secrète confrérie brésilienne du crime
C’est le plus puissant réseau de crime organisé du Brésil. Née dans les années 1990 dans les sinistres prisons du pays, cette organisation aux 35 000 membres domine aussi bien le trafic de drogue que l’appareil pénitentiaire et les favelas. Partout où l’État de droit avait cessé d’exister, elle a imposé sa loi et ses règles.
Judite se rappelle parfaitement le premier contact. Cela se passait en 2006, elle avait 16 ans. Son frère Artur venait de mourir à l’hôpital, après avoir été violemment agressé par des homophobes. Le Premier Commando de la capitale (PCC) a frappé à la porte de chez elle. Quand elle a ouvert, elle a vu “un garçon tout mince, à lunettes, l’air d’un nerd”.
“Tu es la sœur d’Artur ? lui a-t-il demandé.
– Oui, c’est moi.
– Je peux parler avec ton père ?”
Le père de Judite est sorti et a lancé :
“Qu’est-ce que tu veux ?
– Parler d’Artur. Nous savons que vous êtes de la police, mais nous venons vous proposer de tuer les assassins de votre fils. De la manière que vous voudrez.”
Judite raconte que son père, impressionné, a décliné la proposition. Il faisait confiance à la justice divine. “Le garçon en est venu à dire : ‘Si vous voulez, on filme”, raconte cette Brésilienne qui a grandi à Mogi das Cruzes, à la périphérie de São Paulo, dans un quartier où quelques-uns de ses camarades de classe fumaient du crack et d’autres étaient en prison ou morts. Cette journaliste de 30 ans préfère utiliser ce nom [Judite] pour se protéger quand elle parle de la mystérieuse confrérie de délinquants qui domine la vie quotidienne de dizaines de prisons et de centaines de favelas du Brésil.
Le PCC est l’organisation criminelle la plus puissante d’Amérique du Sud. Elle a vu le jour dans la prison de Taubaté, l’une des plus cruelles de São Paulo, l’année suivant le pire massacre carcéral de l’histoire du Brésil [en 1992, 111 détenus ont été tués par la police militaire lors d’une révolte à Carandiru, une autre prison de São Paulo ; ancienne plus grande prison d’Amérique latine, elle a été détruite en 2002]. À l’époque, les prisons du pays se trouvaient dans un état encore pire qu’aujourd’hui. Chacune était soumise à l’autorité d’un caïd, qui pouvait autoriser le viol de l’épouse d’un prisonnier endetté, abuser sexuellement des détenus les plus vulnérables, ou encore attribuer les cellules, raconte Sidney Salles, âgé de 52 ans.
Lui-même en louait une en solo pour ses rencontres intimes. “Ceux qui avaient le plus d’argent vivaient mieux et dominaient les autres prisonniers”, explique-t-il, aujourd’hui installé dans sa maison à Várzea Paulista [une ville de l’État de São Paulo]. “Puis le PCC a commencé à s’occuper des détenus. Souvent des personnes vulnérables, en danger.”
Sidney a été incarcéré six ans dans la prison de Carandiru pour braquage. Là, il a été témoin de l’ascension du PCC. Il a pu troquer son passé de malfrat pour des habits de pasteur évangéliste, survivant de cette époque brutale où, dans les prisons, tout se résolvait à coups de poing ou de couteau. “Pour ne pas faire pleurer sa mère, il fallait faire pleurer celle d’un autre.” Mais le 31 août 1993, l’enfer de la vie carcérale a commencé à changer grâce à un match de football disputé dans la cour de la prison de Taubaté. C’est le jour de la naissance du PCC.
Cet acronyme, qu’on attribuerait volontiers à un parti communiste chinois ou cubain, n’est autre que celui d’une organisation criminelle brésilienne qui a baptisé environ 35 000 “frères” lors d’un rituel tenu secret. Si la ville de São Paulo en est l’épicentre, elle agit partout au Brésil et à l’étranger. Dans ce monde du crime, certains sont cadres, d’autres ouvriers. Le PCC contrôle un trafic de drogue qui génère quelque 100 millions de dollars par an, sans même compter les extraordinaires bénéfices provenant des ventes européennes. L’organisation est présente dans tous les pays sud-américains et collabore avec plusieurs mafias de l’autre côté de l’Atlantique. C’est une organisation aussi singulière que méconnue en dehors de la région. En janvier dernier, elle a marqué l’histoire du Paraguay en y organisant la plus grande évasion carcérale jamais vue dans le pays [plusieurs dizaines de détenus se sont échappés grâce à un tunnel].
D’après les chercheurs, le match de football qui a opposé en 1993 le Premier Commando de la capitale au Commando Caipira est un moment charnière au cours duquel le pouvoir sur la prison change de mains. L’équipe victorieuse tue et décapite le caïd ainsi que le vice-président du pénitencier. Puis, elle roue de coups la tête du premier et empale celle du second sur un pieu, à la vue de tous. C’est ce que décrit Fatima Souza dans son livre PCC : a facção [“Le PCC : la faction”, non traduit en français]. Une scène d’une barbarie inédite.
Les huit détenus qui sortent victorieux du match forgent une alliance. Ils deviennent “frères”. Leurs ennemis : non pas d’autres prisonniers, mais le système et les autorités. Ils exigent qu’on respecte leurs droits. Ils acceptent de terminer leur peine, mais ne toléreront plus qu’on les assassine derrière les barreaux, qu’on persécute leurs familles ou qu’on les prive d’eau pour se laver. Ils vont réussir à incarner la voix des détenus face à l’État. Ils assoient leur pouvoir par la délinquance ; tout en mettant en place leurs propres méthodes de commerce et de résolution des conflits dans les quartiers les plus malfamés.
Peu à peu, l’hégémonie du PCC gagne les prisons et les quartiers. Lincoln Gakiya, le procureur qui cherche depuis 2006 à mettre ses responsables sur le banc des accusés, explique que le noyau dur est constitué de 35 000 frères baptisés en vingt-sept ans d’existence, autour desquels gravitent des centaines de milliers d’autres délinquants et trafiquants, mais aussi des femmes de ménage, des maçons, des vendeurs ambulants ou faisant du télémarketing. Tous vivent au rythme du Premier Commando de la capitale. Ils appellent cela vivre en harmonie avec le PCC, et utilisent aussi le mot “harmonie” pour qualifier les zones d’opération de l’organisation. Le crime organisé se niche là où l’État fait défaut.
Le PCC ne fonctionne pas tout à fait comme un cartel mexicain, la mafia italienne ou les autres organisations criminelles au Brésil, disent les universitaires qui l’ont étudié. Le groupe applique sa propre justice, interdit le crack dans ses prisons, contrôle les prix des drogues à São Paulo, et revendique la chute spectaculaire des homicides dans la mégapole depuis ces vingt dernières années. Le procureur Gakiya ajoute que le PCC a la mainmise sur ses réseaux de trafic de drogue, de la production jusqu’à la livraison dans des ports à l’autre bout de l’Atlantique. Ses collaborateurs européens et africains se chargent de la dernière étape : apporter la marchandise jusqu’aux narines des Européens.
Bien que l’organisation observe une charte et diffuse des circulaires, son fonctionnement reste nébuleux. Aucun “frère” n’ira clamer sur les toits ni même admettre son appartenance au PCC. Impossible de savoir comment ils se reconnaissent entre eux.
Judite se rappelle parfaitement le premier contact. Cela se passait en 2006, elle avait 16 ans. Son frère Artur venait de mourir à l’hôpital, après avoir été violemment agressé par des homophobes. Le Premier Commando de la capitale (PCC) a frappé à la porte de chez elle. Quand elle a ouvert, elle a vu “un garçon tout mince, à lunettes, l’air d’un nerd”.
“Tu es la sœur d’Artur ? lui a-t-il demandé.
– Oui, c’est moi.
– Je peux parler avec ton père ?”
Le père de Judite est sorti et a lancé :
“Qu’est-ce que tu veux ?
– Parler d’Artur. Nous savons que vous êtes de la police, mais nous venons vous proposer de tuer les assassins de votre fils. De la manière que vous voudrez.”
Judite raconte que son père, impressionné, a décliné la proposition. Il faisait confiance à la justice divine. “Le garçon en est venu à dire : ‘Si vous voulez, on filme”, raconte cette Brésilienne qui a grandi à Mogi das Cruzes, à la périphérie de São Paulo, dans un quartier où quelques-uns de ses camarades de classe fumaient du crack et d’autres étaient en prison ou morts. Cette journaliste de 30 ans préfère utiliser ce nom [Judite] pour se protéger quand elle parle de la mystérieuse confrérie de délinquants qui domine la vie quotidienne de dizaines de prisons et de centaines de favelas du Brésil.
Le PCC est l’organisation criminelle la plus puissante d’Amérique du Sud. Elle a vu le jour dans la prison de Taubaté, l’une des plus cruelles de São Paulo, l’année suivant le pire massacre carcéral de l’histoire du Brésil [en 1992, 111 détenus ont été tués par la police militaire lors d’une révolte à Carandiru, une autre prison de São Paulo ; ancienne plus grande prison d’Amérique latine, elle a été détruite en 2002]. À l’époque, les prisons du pays se trouvaient dans un état encore pire qu’aujourd’hui. Chacune était soumise à l’autorité d’un caïd, qui pouvait autoriser le viol de l’épouse d’un prisonnier endetté, abuser sexuellement des détenus les plus vulnérables, ou encore attribuer les cellules, raconte Sidney Salles, âgé de 52 ans.
Lui-même en louait une en solo pour ses rencontres intimes. “Ceux qui avaient le plus d’argent vivaient mieux et dominaient les autres prisonniers”, explique-t-il, aujourd’hui installé dans sa maison à Várzea Paulista [une ville de l’État de São Paulo]. “Puis le PCC a commencé à s’occuper des détenus. Souvent des personnes vulnérables, en danger.”
Sidney a été incarcéré six ans dans la prison de Carandiru pour braquage. Là, il a été témoin de l’ascension du PCC. Il a pu troquer son passé de malfrat pour des habits de pasteur évangéliste, survivant de cette époque brutale où, dans les prisons, tout se résolvait à coups de poing ou de couteau. “Pour ne pas faire pleurer sa mère, il fallait faire pleurer celle d’un autre.” Mais le 31 août 1993, l’enfer de la vie carcérale a commencé à changer grâce à un match de football disputé dans la cour de la prison de Taubaté. C’est le jour de la naissance du PCC.
Cet acronyme, qu’on attribuerait volontiers à un parti communiste chinois ou cubain, n’est autre que celui d’une organisation criminelle brésilienne qui a baptisé environ 35 000 “frères” lors d’un rituel tenu secret. Si la ville de São Paulo en est l’épicentre, elle agit partout au Brésil et à l’étranger. Dans ce monde du crime, certains sont cadres, d’autres ouvriers. Le PCC contrôle un trafic de drogue qui génère quelque 100 millions de dollars par an, sans même compter les extraordinaires bénéfices provenant des ventes européennes. L’organisation est présente dans tous les pays sud-américains et collabore avec plusieurs mafias de l’autre côté de l’Atlantique. C’est une organisation aussi singulière que méconnue en dehors de la région. En janvier dernier, elle a marqué l’histoire du Paraguay en y organisant la plus grande évasion carcérale jamais vue dans le pays [plusieurs dizaines de détenus se sont échappés grâce à un tunnel].
D’après les chercheurs, le match de football qui a opposé en 1993 le Premier Commando de la capitale au Commando Caipira est un moment charnière au cours duquel le pouvoir sur la prison change de mains. L’équipe victorieuse tue et décapite le caïd ainsi que le vice-président du pénitencier. Puis, elle roue de coups la tête du premier et empale celle du second sur un pieu, à la vue de tous. C’est ce que décrit Fatima Souza dans son livre PCC : a facção [“Le PCC : la faction”, non traduit en français]. Une scène d’une barbarie inédite.
Les huit détenus qui sortent victorieux du match forgent une alliance. Ils deviennent “frères”. Leurs ennemis : non pas d’autres prisonniers, mais le système et les autorités. Ils exigent qu’on respecte leurs droits. Ils acceptent de terminer leur peine, mais ne toléreront plus qu’on les assassine derrière les barreaux, qu’on persécute leurs familles ou qu’on les prive d’eau pour se laver. Ils vont réussir à incarner la voix des détenus face à l’État. Ils assoient leur pouvoir par la délinquance ; tout en mettant en place leurs propres méthodes de commerce et de résolution des conflits dans les quartiers les plus malfamés.
Peu à peu, l’hégémonie du PCC gagne les prisons et les quartiers. Lincoln Gakiya, le procureur qui cherche depuis 2006 à mettre ses responsables sur le banc des accusés, explique que le noyau dur est constitué de 35 000 frères baptisés en vingt-sept ans d’existence, autour desquels gravitent des centaines de milliers d’autres délinquants et trafiquants, mais aussi des femmes de ménage, des maçons, des vendeurs ambulants ou faisant du télémarketing. Tous vivent au rythme du Premier Commando de la capitale. Ils appellent cela vivre en harmonie avec le PCC, et utilisent aussi le mot “harmonie” pour qualifier les zones d’opération de l’organisation. Le crime organisé se niche là où l’État fait défaut.
Le PCC ne fonctionne pas tout à fait comme un cartel mexicain, la mafia italienne ou les autres organisations criminelles au Brésil, disent les universitaires qui l’ont étudié. Le groupe applique sa propre justice, interdit le crack dans ses prisons, contrôle les prix des drogues à São Paulo, et revendique la chute spectaculaire des homicides dans la mégapole depuis ces vingt dernières années. Le procureur Gakiya ajoute que le PCC a la mainmise sur ses réseaux de trafic de drogue, de la production jusqu’à la livraison dans des ports à l’autre bout de l’Atlantique. Ses collaborateurs européens et africains se chargent de la dernière étape : apporter la marchandise jusqu’aux narines des Européens.
Bien que l’organisation observe une charte et diffuse des circulaires, son fonctionnement reste nébuleux. Aucun “frère” n’ira clamer sur les toits ni même admettre son appartenance au PCC. Impossible de savoir comment ils se reconnaissent entre eux.
FAB42- Messages : 1563
Date d'inscription : 23/10/2014
Localisation : SAINT-ETIENNE
Re: Le PCC, la très secrète confrérie brésilienne du crime
Oh tu sais la mafia italienne y ressemble beaucoup du moins à l'époque peut être que ça a changé depuis , et les autres mafias de divers pays idem , même s'ils prétendent que non dans ton sujet .
Donc je n'ai qu'un souhait à adresser , l'état de droit doit impérativement exister partout sur le territoire .
PS que fait Bolsonaro ?
Donc je n'ai qu'un souhait à adresser , l'état de droit doit impérativement exister partout sur le territoire .
PS que fait Bolsonaro ?
MarieMadeleine- Messages : 268
Date d'inscription : 23/05/2020
Re: Le PCC, la très secrète confrérie brésilienne du crime
Pratiquement tous les pays ont leur mafia dès lors qu'il y a une population non négligeable en dessous du seuil de pauvreté.
Que ce soit l'Albanie, l'Ukraine ou la Thaïlande, on ces phénomènes de mafia. Les recrutements ne ce font pas dans les quartiers de millionnaires bien sûr.
Que ce soit l'Albanie, l'Ukraine ou la Thaïlande, on ces phénomènes de mafia. Les recrutements ne ce font pas dans les quartiers de millionnaires bien sûr.
Mckay- Tribun
- Citoyen
Messages : 5619
Date d'inscription : 20/05/2014
Niveau débatteur: 5
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