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Grèce : et si c’était une partie de poker menteur ?

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Message par FAB42 Mar 17 Fév - 12:00

L’Eurogroupe du lundi 16 février, à Bruxelles, a-t-il été une réunion où chacun – les Grecs d’un côté, les autres pays de la zone euro de l’autre – a surjoué l’affrontement, afin de ne pas perdre la face et mieux faire passer un futur accord, qui n’interviendra qu’à la dernière extrémité ? Ou a t-on assisté à un réel dialogue de sourds, sans issue ?

« Je ne joue pas, je n’ai pas de plan B », a juré le ministre grec des finances, Yanis Varoufakis, à la sortie de ce nouvel Eurogroupe, qualifié « de la dernière chance » et consacré à l’énorme dette d’Athènes – elle s’établit à 320 milliards d’euros, soit 175 % du produit intérieur brut (PIB) du pays. « J’espère qu’on était en pleine dramaturgie ce soir, mais je n’en sais rien », avouait, de son côté, une source bruxelloise. « Il y a encore du travail de compréhension », glissait, sobrement, une autre source, proche des négociations.

Ce qui est sûr, c’est que, après le fiasco du 11 février, première réunion au sommet entre M. Varoufakis et les dix-huit autres grands argentiers de la zone euro, le rendez-vous de lundi a tourné au « clash ». Il n’y a pas d’accord, a constaté en début de soirée, Jeroen Dijsselbloem, le président de l’Eurogroupe, qui a donné « jusqu’à la fin de cette semaine, pas plus » aux Grecs pour accepter les conditions des Européens. « Je n’ai aucun doute que dans les prochaines 48 heures, l’Europe va réussir à nous soumettre [un document] afin que nous commencions le vrai travail et mettions sur pied un nouveau contrat », a répondu, un peu plus tard, M. Varoufakis.

« On n’a pas avancé d’un iota »

Au bout d’à peine trois heures de réunion, la délégation grecque était descendue en salle de presse du Conseil européen, où se tenaient les discussions des ministres, brandissant un « draft » de conclusions de l’Eurogroupe, qu’elle a qualifié d’« inacceptable ». Selon ce document, les Grecs devaient s’engager à « accepter de conclure avec succès le plan d’aide ». Les Européens, eux, s’engageaient à » utiliser toutes les flexibilités que recèle le programme actuel ».

« Ce n’était pas du tout ce dont nous avions discuté avant l’Eurogroupe avec Pierre Moscovici [le commissaire européen à l’économie], avec qui nous avons eu un échange très constructif », a assuré une source gouvernementale grecque. Cette version des faits est toutefois contestée tant à la Commission qu’à l’Eurogroupe, où l’on prétend qu’il n’a même pas été question de discuter sur un texte d’accord, lundi, les positions ayant divergé tout de suite. « On en est au même point que la semaine dernière, on n’a pas avancé d’un iota », soupirait un proche des négociations, du côté des Européens, lundi soir.

De fait, les termes du débat restent les mêmes. Arrivé au pouvoir il y a à peine trois semaines, le premier ministre grec, Alexis Tsipras, leader du parti de la gauche radicale Syriza, a promis de mettre en œuvre son programme anti-austérité : mesures d’urgence pour les foyers les plus pauvres, relèvement du salaire minimum à 751 euros, remise en cause des privatisations et des mesures de libéralisation du marché du travail imposées par la « troïka » des créanciers (Commission et Banque centrale européennes, Fonds monétaire international). Il demande à l’Europe un « moratoire », ou un « plan relais » de trois ou quatre mois, le temps de négocier cette nouvelle donne.

Utiliser « toutes les flexibilités »

De leur côté, les Européens, unanimes depuis le début des négociations, estiment qu’ils ne peuvent pas donner au gouvernement grec un chèque en blanc, ni le laisser mettre à terre cinq ans de travail de la troïka, alors que celui-ci commence juste à porter ses fruits, le pays ayant dégagé un petit excédent primaire, en 2014.

D’où leur exigence : Athènes doit accepter de « terminer » le deuxième plan d’aide internationale, quitte à en utiliser « toutes les flexibilités ». Ce plan, 130 milliards d’euros au total, lancé en 2012, est assorti de conditions, c’est-à-dire de réformes, qui visent à restaurer l’équilibre des finances publiques, la stabilité du système financier et la compétitivité des entreprises grecques, mais qui n’ont pas encore toutes été mises en place.

Aux yeux des Européens, le plus « logique », au vu des délais – le plan d’aide s’achève théoriquement le 28 février –, serait que les Grecs sollicitent sa prolongation pour six mois. Cette prolongation devant ensuite être approuvée par les parlements nationaux d’au moins quatre pays (Allemagne, Pays-Bas, Finlande, Estonie).

Ce schéma serait tenable d’ici à la fin de ce mois, si le « signal » d’Athènes arrive dans les jours qui viennent, assure-t-on à Bruxelles. Au-delà, sans « programme », la Grèce, qui doit faire face à d’importantes échéances de remboursement (en mars, en juin-juillet, puis en septembre) et ne peut se financer sur les marchés qu’au compte-gouttes et à un taux prohibitif, risque le défaut de paiement.

On ne parle plus de « troïka »

Mais pour M. Varoufakis, il n’est pas question, à ce stade, de se contenter des « flexibilités » promises par les Européens. Et pour M.Tsipras, il apparaît difficile, voire impossible d’accepter de travailler dans le cadre du deuxième plan d’aide : cela reviendrait à endosser politiquement un contrat signé par son prédécesseur, le conservateur Antonis Samaras.

Il y a quelque jours, certains à Bruxelles, avaient évoqué la possibilité, plus conforme au souhait des Grecs, de se lancer dans une discussion sur un troisième plan d’aide. Cette voie a pour l’instant été mise de côté. La proposition de ne plus utiliser le terme « troïka », abhorré des Grecs, a en revanche été adoptée.

A part cette concession minime, pour l’instant, c’est la ligne « dure » des Allemands qui prévaut. « Ils sont vraiment exaspérés », soulignait une source européenne, lundi soir. Les attaques de la presse grecque présentant le ministre des finances, Wolfgang Schäuble, en nazi, et les demandes répétées de M. Tsipras de récupérer une « dette de guerre » allemande n’arrangent rien.
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